La Justice est en berne en Haiti.

JUSTICE TOUJOURS EN BERNE : ABSENCE INDISCUTABLE DE L’AUTORITE DE L’ETAT. DEBACLE. OÙ ALLONS-NOUS ALORS ?*

Me. Fritznel HECTOR
CG-Cour d’Appel-Hinche

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Aucune société ne peut se prétendre à la viabilité et à la prospérité sans un Pouvoir Judiciaire fort, sain, équilibré, et surtout maître de lui-même.

Important de rappeler qu’il est des moments cruciaux qui doivent interpeler tout citoyen responsable. Et on est tenu, en ces occasions inédites, de partir vaillamment en quête de tout ce qui peut concourir à une amélioration d’une situation donnée.

Et en agissant autrement, on risque de se retrouver en un carrefour où l’on ne pourra qu’abdiquer piteusement, se prêtant ainsi le flanc à des critiques acerbes, même des observateurs les plus modestes.

On ne doit pas passer tout son temps à improviser, dénoncer, tergiverser, ni à compter des morts. Il est impérieux de travailler à la recherche d’antidotes valables devant enrayer tel ou tel mal qui décime une population donnée à une époque donnée.

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1986, on croyait qu’après des soulèvements populaires qui allaient occasionner la chute des Duvalier, il y aurait une Haiti plus prospère où il fasse bon de vivre, parce tous se plaignaient des dérives et des excès des Duvalier.

Pourtant, des hommes très virulents contre l’ancien système vomi ne prendront pas de temps pour recommencer avec les pratiques énergiquement dénoncées sous le régime qu’ils ont conduit à la faillite.

Pour aboutir au départ de Jean-Claude DUVALIER, ils ont coupé routes, dressé barricades, brûlé caoutchoucs, brûlé vif des êtres humains, fermé écoles, assassiné les gens, etc…

Ils se sont multiplié toutes les formules diaboliques, triviales et incandescentes pour parvenir à leurs fins. Ils dirent vouloir libérer Haïti et apporter de nouvelles chances à la population qui en avait mare.

Pourtant, l’après 86 se révèle, à la fois plus pitoyable, nettement moins alléchante et surtout beaucoup plus meurtrière et sanguinaire.

Le résultat se justifie plutôt par toute une foule de riches illicites, et l’institutionnalisation en filigrane de l’absence de l’autorité de l’Etat entérinée surtout par la désinvolture, l’impunité, la corruption effrénée, et toutes les anomalies du genre. Aucune Justice pour dire quoique ce soit de valable, parce qu’elle même quotidiennement decriee sans merci, par ceux-là mêmes qui sont tenus de la contrôler pour la rendre efficiente et dignement opérante.

Une Constitution de 1987 adoptée dans une réelle euphorie en arrive à asseoir un régime politique inapproprié qui réduit les trois pouvoirs de l’Etat en un seul et unique pouvoir sans aucun contrebalancement.

L’Education est à son point mort avec toute une kyrielle de centres de formation qui sont loin de satisfaire au standard approprié, mais qui évoluent au su et au vu de tous les inspecteurs mensuellement payés par l’Etat pour s’assurer que tout est à point fort dans les différents établissements de formation fondamentale, secondaire et universitaire, formelle ou informelle.

Et à tout cela, il faudra ajouter à encre rouge des élèves et des étudiants qui, avec les nombreuses manifestations de rues, perdent annuellement plus de la moitié des programmes de leur curriculum, mais toujours promus au niveau supérieur avec brio, avec toutes leurs lacunes jamais comblées pour la vie.

Les hôpitaux ne sont en rien pourvus. Pour une gaze, on est obligé de différer une intervention chirurgicale qui coûte, plus d’une fois, la vie. Parfois, des grèves et des manifestations empêchent aussi des malades d’atteindre les agents de santé à temps. Et ils expirent faute de soins, à cause des routes barricadées ou des grèves dans les centres de santé.

L’agriculture est délabrée au point que nous vivons à la solde des produits alimentaires dominicains, même avec les mépris les plus manifestes de leur part. Nous sommes obligés d’avaler nos pilules, si amères soient-elles. Bon nombre de nos jeunes désemparés et en quête de mieux, y cherchent pourtant refuge, comme ils le font vers le Chili, et d’autres petits pays de moindre population que nous, mais apparemment mieux organisés.

Et tout convaincus de nos faiblesses et incapacités, les voisins dominicains nous couvrent parfois de bien d’invectives et de traitements inhumains auxquels aucune réponse diplomatique appropriée n’attache la moindre importance.

Et, en dépit de tout, nous persistons, tête baissée, dans toutes les sales besognes qui nous enlaidissent et nous détruisent.

Encore aujourd’hui, avec tout ce palmarès si sombre, en est-on impitoyablement à couper routes et ponts, brûler vif des civils et des policiers en uniforme, circuler avec des armes à feu de grand calibre au grand mépris de la Constitution et des lois qui fixent le mode de traitement pour le port des armes à feu.
C’est la peur bleue partout. C’est le stress à n’en plus finir.

Les autorités judiciaires et policières légalement constituées sont obligées de se plier aux caprices des bandits en possession d’armes avec la complicité de certains grands dirigeants de l’Etat. Hélas ! Aucune gêne, aucun amour-propre.

Et cette semaine, ils entendent se féliciter de leurs menées cruelles, meurtrières et insensées pour soutenir que ces activités de destruction certaine se retrouvent même en France. Ils entendent imiter et applaudir tout ce qui ne peut que concourir à leur malheur, oubliant que la France est un pays du G7, et que ces actions isolées n’auront jamais le niveau de répercussion que nous, peuple du tout petit Etat toujours classé en dernière position pour notre région.

Et ce n’est pas sans honte que l’on entend scander cette affaire de dialogue dans le pays, comme si tout ira bien avec le dialogue. Après des incidents regrettables tout assortis de sérieuses pertes en vies humaines, que c’est impitoyable et inhumain de venir s’asseoir pour le dialogue et la négociation !

Oui, le Pouvoir en place doit inviter tout le monde à venir s’asseoir. Mais tous ceux qui ont été avant le président Jovenel ont toujours souscrit à des dialogues qui nous ont toujours conduit malheureusement à ce que nous vivons actuellement.

Que de dialogues n’ont pas été tenus ! Et quel résultat ? Alors, aujourd’hui, dialogue. On vient. On discute. On distribue des postes des Ministères et des Directions Générales. On est ponctuellement satisfait. Et dans quelque trois mois, les mêmes manifestations pour d’autres groupes qui n’ont pas su trouver les faveurs.

Non, cette formule de dialogue se présente aussi fantaisiste que dilatoire. Il faudrait plutôt en finir avec, pour que les politiciens de terrain apprennent bien à respecter les mandats des élus sans aucunement les interrompre par des manœuvres criminelles et tuatoires.

Il faut que la Justice soit à même de s’affirmer pour sévir contre tous les auteurs déclarés ou suspects des actes criminels qui ont semé le deuil dans cette société haïtienne déjà si exploitée et appauvrie.

Les politiciens persistent dans leurs menées malsaines parce qu’ils n’ont jamais été appelés à comparaître par devant leurs Juges. Des morts, des blessés ont toujours résulté de ces activités visiblement criminelles. Mais malheureusement, les veuves et les orphelins n’ont jamais eu une Justice à leur venir en aide. Est-ce bien la justice ou l’injustice personnifiée ?

Et qui pis est, parfois, ce sont les plus innocents et les plus naïfs, sans même aucune velléité politique qui sont victimes d’actes de banditisme. Ils n’ont jamais été pris en considération, ni par le pouvoir en place, ni par les auteurs directs des manifestations qui ont coûté des pertes énormes de vies humaines, et des dégâts matériels considérables, sans compter les divers troubles psychologiques toujours non dénombrés.

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Ne faut-il pas, en toute décence, trouver des moyens sûrs de régulation devant mettre à l’abri les ressortissants de l’Etat ?

La Justice ne devrait-elle pas être apte à s’affirmer pour jouer valablement sa fonction régulatrice ?Mais cette *Justice en lambeaux* qui semble en dehors du moindre souci, même des institutions les plus concernées par sa survie et son mode de fonctionnement optimal, ne peut se faire, comme tout le monde, qu’un statut de témoin devant les scènes horribles qui entravent l’harmonie et le respect de la personne dans notre société.

*Désarmée au possible, démotivée par des frustrations de tous ordres, et tout indument émiettée, voilà notre Justice pendant que l’on ne cesse de la croire indépendante à longueur de journée.*

Soumis à des traitements tout indignes de leur rang, les magistrats doivent assister, tout victimes de la violation systématique des lois régissant leur statut, à ce jeu tout macabre qui sème le deuil, la tourmente et les douleurs poignantes dans cette société plutôt vouée au sauve-qui-peut.

Hélas ! Quelle société d’Etat de droit avec cette Justice cadavérique ! Les Justiciables persistent dans leurs insatisfactions quotidiennes justifiées. Des séminaires et des rencontres du genre sont toujours tenus. Des plaintes pleuvent à verse contre des Magistrats assis qui sont toujours conservés dans leurs postes, ou transférés dans d’autres lieux, ou ont eu leurs mandats toujours renouvelés, sur recommandation expresse de l’instance de recommandation qui a toujours encaissé des plaintes préalables.

Malheureusement, les Magistrats debout sont toujours renvoyés pour le moindre excès. *C’est indiscutablement une Magistrature haitienne à deux poids et deux mesures.*

Et il ne faudra pas oublier que les Magistrats assis bénéficient de sérieux privilèges à longueur de journée. Le CSPJ plaide toujours en leur faveur.

Et à la vérité, faudra-t-il bien le souligner, même avec tout ça, ils n’arrivent pas vraiment un salaire de Magistrat à proprement parler. Leur salaire est nettement inférieur au coût de la vie, avec plus de 75 gourdes pour 1 dollar américain. Et surtout quand on sait que, même dans la plupart des pays africains, l’on s’arrange pour fixer le salaire d’un Magistrat de l’instance la plus inférieure à 2.300 euros.

Mais, malheureusement, les si pauvres et malchanceux magistrats debout (les Commissaires du Gouvernement et leurs Substituts), au contraire, ne reçoivent le moindre avantage d’un Supérieur hiérarchique. Et leurs salaires n’ont jamais été ajustés. Et ils sont les seuls dans le système à ne rien bénéficier jusqu’ici. Même les revendications des greffiers et des huissiers ont été, en partie, prises en compte. *Là encore, n’y a-t-il pas vraiment lieu de parler de Magistrature haitienne à deux poids et deux mesures ?*

Les lois qui traitent du statut des Magistrats en général, même n’ayant été jamais soumises à un quelconque amendement, sont cependant aveuglément violées pour défavoriser les magistrats debout.

Quelle Justice dans ce pays assoiffé de saine, impartiale et équitable justice, alors que les Magistrats eux-mêmes en sont à souffrir de l’impartialité et de l’inégalité les plus criantes !

La Magistrature haïtienne est à reconsidérer à bien des égards, pour n’être plus victime de ces disparités criantes, source d’autant de conflits sournois et intermittents que de frustration outrancière.

*Un pays toujours en effervescence se doit de disposer d’une Justice crédible, équilibrée, bien entretenue, et toujours prête à agir, au moment opportun. Car sans la paix, la tranquillité, la quiétude d’esprit et surtout la stabilité dans la société, on ne devra jamais s’attendre à la prospérité et au développement durable.*

Et cette mission délicate et essentielle n’est dévolue qu’à la Justice et à la Justice seule, avec absolument un Pouvoir Judiciaire fort, conséquent, indépendant, et tout maître de lui-même.

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En effet, on s’en est toujours pris aux DUVALIER, accusés d’avoir tué et même désorganisé la nation haïtienne. Mais peut-on être honnête pour comparer les morts sous Duvalier à ceux de l’ère post 86 ? Ou même y aurait-il lieu de croire à un moment dans lequel cette nation haïtienne a eu à connaître autant de désorganisation et de déséquilibre que durant cette période post 86 ? Je ne crois pas vraiment qu’il puisse y avoir matière à pari dans cette affaire.

Je crois bien comprendre qu’il faut absolument quelque chose de plus potable pour le pays. Il est temps, oui, il est grand temps que l’on cesse de s’attaquer à des élus pour les contraindre à remettre le pouvoir qu’ils ont acquis aux prix de sérieux efforts à d’autres qui ont été aux élections comme eux, et qui n’ont pas pu bénéficier des largesses des urnes.

Au contraire, la population leur a demandé d’attendre un tout petit peu. En démocrates, ils sont tenus de se plier aux travaux ttdécisions de la majorité. Car, seuls des anarchistes convaincus peuvent prêter cette voie tortueuse, incendiaire, et insensée pour demander le départ d’un élu à une majorité qu’ils n’ont pas pu avoir la moindre capacité d’obtenir eux-mêmes.

En outre, il faut être honnête. Le bon sens même commande de se questionner devant une situation. J’ai été aux élections. Le peuple a été convié à choisir un élément sur plusieurs que nous avons été. Et le pouvoir appartient au peuple. Si le peuple le voulait bien, il me voterait pour avoir gain de cause. Mais s’il ne le fait pas pour le moment, comme je rêve toujours du bien pour mon pays, je vais plutôt me préparer pour une meilleure performance aux plus prochaines joutes, si ça m’intéresse encore.

Mais pourquoi dois-je plutôt mettre tout mon temps à nuire à l’élu qui m’a supplanté ? C’est comme manquer de scrupule. *On ne dirige pas parce qu’on le veut, on dirige parce qu’on a été désigné et accepté. Et si l’on n’a pas été accepté, on n’a à se plaindre de personne, sinon que de reprendre le bouleau pour être mieux apte, la prochaine fois.* Et c’est une loi de la vie. Boileau n’a-t-il pas conseillé : *Vingt fois sur le métier*?

On ne doit pas se mettre à détruire d’humbles pères de famille qui doivent laisser dans l’amertume et la mendicité, et veuves et orphelins. Et dans ce cas, c’est la société haïtienne dans son ensemble qui en pâtit.

Cette pratique, il faut absolument en finir avec. Un président est élu pour cinq ans. Qu’il termine son mandat, quitte à l’écourter aux plus prochaines joutes. Il ne pourra jamais resurgir. Mais il doit absolument terminer son mandat. Et c’est là le propre de tout État de droit

Les Organismes nationaux et internationaux luttant quotidiennement pour le respect des droits n’ont le moindre intérêt à encourager ou catalyser le départ d’un dirigeant élu.

Malheureusement, ils sont légion des jeunes universitaires qui se laissent prendre au piège de ces mal intentionnés. Ils ne se font aucune capacité de réflexion pour désarmer et réduire à néant ces fossoyeurs de la Patrie qui les invitent à des manifestations gratuites de rues et à des menées si subversives. Ils ne se rendent pas compte que ceux-là ne font que travailler ardemment à l’empiration effective de leur sort déjà si funeste.

Pourtant, il y a beaucoup à faire. Les dirigeants doivent faire montre de plus de perspicacité. Nous ne cesserons jamais de supplier le Président de la République à corriger ses cahiers, et prendre de nouvelles voies plus sûres.

Il nous faut l’encourager dans ses efforts qui ne pourront produire d’effet réel que par notre collaboration. Et ce serait si indigne de nous de le laisser tout seul à penser pour nous. La bonne volonté est là. Mais s’il lui manque certaine assistance, nous sommes tenus, pour l’amour de cette Patrie mourante, de lui prêter toute assistance de manière à lui rendre la tâche plus facile. Car sa réussite ne sera qu’à notre plus grand intérêt. Il ne va jamais réussir pour lui seul et sa famille. Impossible.

S’il réussit, c’est à l’avantage de la nation toute entière. Mais son échec se répercutera sur toute la population, et nous coûtera encore quelques bonnes années de retard.

Ressaisissons-nous, et sachons comprendre que la collaboration que nous prêtons à un quelconque élu de la nation ne sera toujours qu’à notre avantage dans l’ensemble. Et si, au contraire, il échoue, c’est la ruine totale de tout un chacun dans la nation, avec de bien longues et néfastes conséquences.

*Me. Fritznel HECTOR,*
*Commissaire du Gouvernement*
*Cour d’Appel-Hinche*

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