Le pays est à vivre l’un des moments les plus délicats de son histoire. C’est comme si, on se retrouve dans un labyrinthe. On sait qu’on y est. Mais comment en sortir alors ?
Suite à des consultations de tous horizons, il pleut bien des premiers ministrables. Pourtant, de tous les noms sur le plateau, nul ne peut jusqu’ici trouver l’aval du Président de la République et des présidents des deux Chambres. Haïti aurait-elle été le théâtre de cette crise aiguë d’hommes ne pouvant en rien inspirer confiance ? C’est pas vraiment possible, et c’est même trop lamentable dans ce cas.
*Donc, on peut voir clair que tout est à refaire en Haïti.*
6,7 juillet 2018, levée sauvage de bouclier. Le Président assume avoir bien pris note des doléances brutales du peuple. Et il saura quoi faire pour corriger son cahier. Et depuis, rien de plus consistant n’est fait comme pour montrer effectivement que les cris du peuple ont été pris en considération. On multiplie des rencontres. On fait des promesses. On met en suspens pour les plus prochaines 24 heures. Et avec tout ça, l’on est presqu’à la mi-août. Il ne se dessine pourtant aucune lueur d’espoir comme pour donner l’impression que l’amélioration du sort du peuple à été vraiment au menu.
C’est vrai que l’arrivée d’un nouveau Gouvernement ne va pouvoir rien apporter de plus substantiel pour le peuple toujours aux abois et marginalisé jusqu’à l’oubli et le mépris. Mais comme il y a eu cette promesse formelle que la démission de Jack Guy LAFONTANT devrait absolument apporter de nouvelles espérances pour le peuple, ce serait vraiment séant qu’après la démission, l’on puisse, en un temps raisonnable, jeter le dévolu sur quelqu’un qui doit être à même de mieux donner. Dans le cas contraire, le pays connaîtrait encore un retard jamais enregistré dans notre histoire de peuple.
Rappelons qu’à chaque nouveau gouvernement, de nouveaux privilégiés émergeront. De nouveaux ministres et secrétaires d’Etat viendront alourdir les dépenses de l’Etat. De nouveaux Premiers Ministres viendront bénéficier des largesses de cet État tout appauvri au détriment de la classe moyenne et de la grande masse qui n’auront toujours rien à gagner. C’est pas vraiment potable, pareil breuvage.
Voilà pourquoi, plutôt que de perpétuer cette lutte avec ces structures décousues qui nous rabaissent de mieux en mieux, ce serait nettement plus avantageux de s’asseoir pour refonder l’Etat haïtien.
Parce que nous avons passé tout notre temps à ne construire que sur du sable mouvant. En un rien de temps, c’est la débandade et le sinistre, parce que rien de rassurant n’a été préalablement prévu.
Et en dépit de tout, aucune prise de conscience réelle. Tout le monde entend profiter de l’amateurisme institutionnalisé pour changer de statut socio-économique. Et même si tout le monde est aux abois, les plus intelligents trouveront toujours les moyens appropriés pour tirer leur épingle du jeu, et bondir en avant. Vauvenargues aurait bien raison de soutenir que *”les vertus se perdent dans l’intérêt comme les fleuves dans la mer.”*
Ça se voit à l’oeil nu chez nous. *Tout est démodé. La désinvolture s’impose en règle. L’amoralité imprégne même les rares institutions morales. Le respect de la personne et des principes établis se volatilise au point que tous ceux qui veulent se conformer à ces exigences sont aussitôt taxés de purs déviants.*
Peut-on encore avoir la décence de faire croire à quelqu’un que l’on évolue en toute quiétude dans pareille société où n’importe quoi peut arriver n’importe quand, n’importe comment et n’importe où ? Tout ce qui est rejeté comme intolérable et anormal est chouchouté chez nous. Et c’est la dégradation irréversible et incontestable pour laquelle nul ne se fait pourtant souci.
Il est grand temps que les politiques s’affirment comme pour montrer effectivement qu’ils comprennent en profondeur les laides réalités de terrain contre lesquelles ils entendent partir vraiment en guerre.
Le temps n’est plus au saupoudrage ni au trompe-l’oeil. Il faut bien s’acharner à dire même ce qui ne plaît pas toujours. Car, à trop se refuser à dire la vérité, on risque de tout détruire par la sécheresse et la persistance de ses interventions superficielles et encensées.
À mon sens, l’on doit rompre avec toute forme de flatterie mesquine pour dénoncer tout ce qui est incorrect et destructeur. Cessons donc de cacher les maux qui nous envahissent si nous voulons bien nous éviter les statuts de vrais cancéreux.
Pourquoi encenser encore ? En le faisant, on ne risque que de détruire cette nation qui n’a jamais intéressé l’haitien s’il ne peut pas l’exploiter à son profit personnel.
*Et le pire, c’est que, au point où nous sommes parvenus, il n’y a vraiment plus rien qui puisse faire penser à mieux sinon qu’une refonte en profondeur de cet État qui ne peut en rien répondre aux attentes de ses ressortissants.*
*Il nous faut absolument un projet viable de société.* Il nous faut nous questionner à partir de nos pays voisins et amis. S’ils sont meilleurs en organisation, pourquoi serions-nous si hautains pour ne pas nous mettre à leur école, tout en tenant compte de nos propres réalités culturelles ?
L’essentiel, ce n’est pas de recopier leurs structures et organisations. Rêvons plutôt de ce qui est nôtre et qui reflète nos réalités de peuple. Car, en toute honnêteté, on ne doit plus persister à patauger dans cette indécence putride pour dire que le pays d’Haiti n’a point besoin d’un remue-ménage en tous les points de vue.
*Il faut, à tout prix, refonder l’Etat haïtien pour le rendre plus conforme aux modernités de l’heure.*
En fait, on ne peut rien penser de favorable pour ce pays et pour la masse dépourvue de tout, *sans une nouvelle répartition géographique,* pour s’extraire de cette incohérence de *10 ou 11 départements* dans un pays de *seulement 27.750 km2* de superficie. Alors que des *50 Etats des États-Unis d’Amerique,* il n’y en a que *sept (07)* à être inférieurs ou égaux à Haïti en superficie. Citons : le plus petit État, *Rhode Island (4002 km2), Delaware (6447km2), Connecticut (14.357km2), New Jersey (22.588km2), New Hampshire (24.216km2), Vermont (24.901km2) et le Massachusetts (27.336km2).* Les trois plus vastes Etats : *l’Akaska (1.717.857km2), le Texas (696.621 km2), et la Californie (423.970 km2). Le Montana, le 4e, avec 380.834 km2 et New Mexico, le 5e avec 314.915km2.*
Il n’y a rien à trop espérer dans ce pays avec *ce régime mi-parlementaire qui exige un Premier Ministre avec un Parlement bicaméral* comme des pays riches ou émergents qui disposent des ressources économiques appropriées pour soutenir des parlementaires et un Premier Ministre. Encore faudra-t-il souligner que près de *115 pays* sur les *195* dans le monde fonctionnent avec un parlement monocameral. En Europe seulement, il y en a près de 30. Citons, par exemple, la Chine, la Corée du Sud, la Corée du Nord, le Costa-Rica, Cuba, le Danemark, l’Egypte, le l”Equateur, la Finlande, la Grèce, le Guatemala, le Honduras, l’Israël, le Liban, le Nicaragua, le Panama, le Pérou, le Portugal, le Salvador, la Suède, le Sénégal, le Vénézuela.
Et bien que le *bicamérisme* soit l’une des caractéristiques du *fédéralisme,* il y a *deux (02) des vingt-sept (27) pays fédéraux* du monde qui adoptent un *parlement monocameral.* On citera en ce sens *l’Irak,* devenu pays fédéral en 2005, et le *Venezuela* (depuis 1863).
Faisons aussi remarquer que *les Etats-Unis d’Amérique a été et reste encore le premier pays fédéral du monde* (depuis son indépendance en 1776) ; *la Suisse* en sera le 2eme, en 1848 ; *l’Argentine* viendra en 3eme en 1853 ; *le Venezuela,* en 4eme,1863 ; le *Canada,* en 5eme, 1867, le *Mexique* en 6eme, 1871, et le *Brésil* en 7eme, 1889.
Autant dire que l’Amérique reste donc le *champion du fédéralisme* dans le monde ; le *premier pays européen* à expérimenter le *fédéralisme* est *la Suisse,* en 1848, juste après les États-Unis ; le 2eme, c’est *l’Autriche,* 1920 ; *l’Allemagne* viendra en 3eme, en 1949. *L”Australie* viendra en 1901.
Les plus récents pays fédéraux dans le monde sont : la *Somalie (2012),* le *Soudan du Sud (2011),* le *Népal* *(2008),* et *l’Irak (2005).*
On ne saurait pouvoir retrouver rien de sérieux dans ce pays avec les dépenses somptueuses et quotidiennes des grands commis de l’Etat qui bénéficient de tous les privileges au détriment de la grande masse toujours croupie dans la misère la plus noire, *comme pour rappeler l’opulence manifeste du clergé et de la noblesse avant la révolution bourgeoise française de 1789.*
Et rien à espérer dans ce pays où *l’éducation et la Justice* ne se donnent encore qu’au rabais, si l’on en donne effectivement.
Rappelons seulement que la France n’évolue qu’avec *19 ministères et quelques huit (08) Secrétaires d’Etat.* Chez nous, on a parfois recensé *plus de 20 ministres, et parfois 20 jusqu’à 25 Secrétaires d’Etat,* (Conille et Lamothe) ; (actuellement et heureusement, avec LAFONTANT, même encore trop,18 ministres et quatre Secrétaires d’Etat)
Pourquoi ?
Nos ambassades et consulats regorgent de gens dont on doute
bien de leur formation même académique, et qui ne sont pas toujours accrédités par les pays où ils restent pour bénéficier de tous les privilèges dûs à des diplomates.
Rappelons enfin qu’Haiti est le seul pays où les dirigeants, loin de servir et protéger le peuple, se complaisent plutôt dans leurs privilèges qui les mettent toujours en face de ce peuple. C’est le seul pays où mieux l’on est rémunéré, mieux on bénéficie de privilèges.
Et quand le peuple ne bénéficie de rien du tout en matière de *Justice sociale,* on apprend plutôt que tous les grands commis de l’Etat oublient aisément leurs salaires mensuels qui ne leur représentent rien du tout par rapport à de multiples types de frais, per diem, et tant d’autres.
Quand le personnage moyen ne peut même manger à sa faim avec le si maigre salaire qu’on lui réserve, le grand commis ne fait qu’entasser ses salaires mensuels puisqu’ils ne disposent pas vraiment de moyens et de temps pour les utiliser. Leurs salaires tout considérables par rapport à d’autres, se voient encore assortis de toute une gamme de privilèges, toujours au plus grand détriment de la masse dépourvue de tout. Et ils s’arrangent toujours pour venir sucer à la mamelle de “grann Haïti.”
Toutes les manifestations de rues, les interventions à la radio et la télévision, les réseaux sociaux, tout cela n’est que des manœuvres toutes déloyales qui doivent leur ouvrir l’accès à des débouchés qui leur faciliteront cette capacité de venir s’enrichir, sans la moindre velléité en faveur de la grande masse qu’ils se plaisent à torpiller impitoyablement.
Cette situation doit absolument connaître un terme pour ouvrir la voie à un traitement meilleur pour ce peuple inoffensif, naïf, et si transigeant.
Alors que la tendance voudrait faire croire que le peuple haïtien est méchant et brutal, je prends toute l’autorité de penser le contraire pour assimiler la masse haïtienne à des civilisés, voire des agneaux qui se complaisent dans leur situation de misère à eux imposée.
Cependant, comme *ventre affamé n’a point d’oreilles,* parfois, ces méprisés s’endurcissent au comble pour réclamer leur part. Et comme de nos jours, il n’existe plus un *Toussaint Louverture* pour assurer leur défense avec son intervention : *”Et mes frères, les noirs qui, eux aussi, ont combattu, ils n’auront rien ?”*,eux personnellement, ils prennent le chemin, comme pour rappeler qu’eux aussi, ils se doivent de bénéficier amplement de cette patrie que leurs ancêtres leur ont léguée comme héritage. Malheureusement, à court de leaders sérieux, ils prennent toujours la pire direction.
Les grands commis de l’Etat voudront bien se rappeler qu’ils ne sauraient être les seuls héritiers de cette succession ouverte depuis la mort
de nos ancêtres. Il faut une part d’héritage à tous les ayant-droits. Et qu’ils se le rappellent bien. On est tous fils et filles de la même mère patrie.
Et si les citoyens savaient bien tout ce qu’un Premier Ministre coûte au pays, ils ne rêveraient jamais de renvoi prématuré d’un Premier Ministre qui aussitôt, a droit à sa retraite de 150.000 gourdes et des frais mensuels tout exorbitants allant jusqu’à 350.000 gourdes durant les deux premières années après sa fonction de Premier Ministre. N’est-ce pas là une nouvelle charge pour cet État déjà si dénudé ? Alors, ne serait-il pas plus avantageux d’éviter cette hausse de dépenses autant que possible ?
Mais, puisque les circonstances de l’heure le commandent bien, que l’on fasse montre de pure sagesse pour ne point alimenter la paranoïa d’un peuple déjà tout courroucé contre la gestion à la fois calamiteuse, irresponsable et infernale de ses propres deniers, ce qui le prive surtout de tout ce qui lui revient de droit.
Me. Fritznel HECTOR, Avocat
Commissaire du Gouvernement a la Cour d’Appel de Hinche.